Le Comité de la Chambre des communes débute les audiences sur l’imidaclopride sous une influence disproportionnée de l’industrie
Ottawa, le 6 mars 2017 — Les principaux groupes environnementaux, des défenseurs de la santé et des mouvements de mobilisation soulèvent leurs inquiétudes devant l’évaluation partiale de la proposition d’abandon graduel des pesticides composés d’imidaclopride, l’un des trois insecticides controversés largement utilisés de la classe des néonicotinoïdes (« néonics »). L’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) du Canada a proposé l’abandon graduel des principales utilisations de l’imidaclopride d’ici trois à cinq ans, après qu’une évaluation environnementale ait mis au jour des niveaux dangereux du produit chimique contaminant l’environnement.
Le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes a demandé la prolongation de la période de commentaires afin d’étudier la proposition lors d’audiences qui débuteront mardi. L’avis publié sur le site Web du comité pour la rencontre de mardi mentionne CropLife Canada (l’association commerciale de l’industrie des pesticides), aux côtés de Syngenta Canada et de Bayer CropScience Inc. (des fabricants de pesticides néonics) comme témoins. Des représentants de l’ARLA et d’Agriculture et agroalimentaire Canada sont également invités à être présents. Environnement et Changement climatique Canada ne se retrouve pas dans la liste des témoins. Aucun des groupes à l’origine du présent communiqué de presse n’avait été invité à participer aux audiences. Une heure après la diffusion de la version originale ce matin, la Fondation David Suzuki a reçu une invitation à témoigner devant le comité.
« Il semble que le Comité ait décidé de ne donner la parole qu’aux lobbyistes de l’industrie, qui sont contre la restriction des pesticides. Il est inquiétant de constater que les enjeux environnementaux se retrouvent en bas de la liste de priorités », mentionne Sidney Ribaux, directeur général d’Équiterre.
« Les scientifiques indépendants mettent en garde contre l’utilisation massive de néonics, car ceux-ci menacent de nombreuses espèces », explique Lisa Gue, analyste senior des politiques en santé environnementale de la Fondation David Suzuki. « Nous recommandons vivement à l’ARLA d’entériner sa décision sur l’abandon graduel de l’imidaclopride, de devancer l’échéancier et d’entreprendre des actions parallèles pour l’interdiction des autres néonics. »
« Il y a eu un appui massif du public en faveur de la proposition du Canada d’interdire l’un des néonics les plus nocifs », ajoute Liz McDowell, directrice de campagne pour SumOfUs. « Les gens savent que l’utilisation répétée de ces produits chimiques n’est ni nécessaire ni durable, et ils ne veulent pas voir les lobbyistes de l’industrie aller contre une mesure de cette importance. »
Plus de cinq millions de personnes, dont des centaines de milliers de Canadiens, ont signé les pétitions d’Avaaz et de SumOfUs réclamant l’interdiction des néonics et déjà plus de 110 000 Canadiens ont soumis des commentaires individuels à l’ARLA en soutien à l’interdiction de l’imidaclopride.
La mortalité massive d’abeilles liée à l’utilisation des néonics en agriculture a motivé les chercheurs et les organismes de régulation du monde entier à réévaluer les pesticides ces dernières années. En 2015, le Task Force on Systemic Pesticides, un groupe de travail international regroupant des scientifiques indépendants, a évalué plus de 1 000 études scientifiques sur les néonics. Ils y ont trouvé la preuve évidente de leur nocivité pour les abeilles et autres pollinisateurs, les invertébrés terrestres tels que les vers de terre, les invertébrés aquatiques et les oiseaux. Le groupe de travail a sonné l’alarme au sujet de ces pesticides qui détruisent des services écologiques comme la pollinisation, lesquels s’avèrent essentiels à une sécurité alimentaire à long terme. Les dernières recherches montrent que les néonics et leurs résidus sont potentiellement nocifs pour la santé humaine.
L’Union européenne interdit partiellement les trois néonics, y compris l’imidaclopride et la France a récemment adopté une loi interdisant tous les néonics à partir de septembre 2018.
Au Canada, l’ARLA a réévalué l’imidaclopride l’année dernière et a conclu que son utilisation n’était pas durable en raison des risques pour les écosystèmes aquatiques. Les résultats de l’évaluation environnementale démontrent la présence d’imidaclopride dans les lacs et rivières du Canada à des niveaux considérés comme nocifs pour les insectes aquatiques essentiels à la santé des écosystèmes aquatiques. L’évaluation n’a pas pris en compte les risques pour les pollinisateurs, pour lesquels l’ARLA mène une évaluation dans un processus distinct, en partenariat avec l’Environmental Protection Agency (EPA) aux États-Unis, laquelle se déroule depuis 2012.
« Nous aimerions voir une action rapide pour contrer la contamination de l’environnement par l’imidaclopride », plaide John Bennet du groupe des Ami(e)s de la Terre. « Aucun argument scientifique ne justifie sa présence sur le marché pour un autre trois à cinq ans. »
Le directeur de campagne d’Avaaz, Danny Auron, ajoute que « ce produit chimique menace la fragile toile de la vie, des insectes aquatiques aux abeilles et aux oiseaux. C’est pourquoi des millions de personnes pressent le gouvernement de placer la protection des abeilles, de la population et de l’environnement devant les intérêts toxiques de l’industrie. »
L’ARLA se penchera jusqu’au 23 mars 2017 sur la proposition d’abandon graduel de l’imidaclopride, avant d’émettre une décision définitive plus tard dans l’année.
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Diffusé au nom des groupes suivants :
- Fondation David Suzuki
- Avaaz
- SumOfUs
- Équiterre
- Ami(e)s de la Terre
- Association canadienne du droit de l’environnement
- Environmental Defence
- Prevent Cancer Now
- Alliance pour l’interdiction des pesticides systémiques
- Association canadienne des médecins pour l’environnement (ACME)